Un conducteur de voitures volées.
Il traîne partout son secret. Il a du style, il détonne, il est différent. Seul il accomplit cent méfaits.
Un arnaqueur sans vergogne, il utilise la parole pour enrober les gens, il séduit sans merci l’orphelin et le faible
Les deux sont les fils de l’infortune
Le conducteur subi chaque jour de mauvais traîtement de la cheffe de la mafia, l’arnaqueur essuie les dérobades embarrassées de sa femme.
Les deux hommes souffrent cruellement en silence. Chez le chauffeur le champignon du malheur croit sans cesse jusqu’à exploser jusqu’au jour fatidique.
Une bouteille
Un volant
Un accident
Le chauffeur perd son permis et est expulsé de la mafia. Il se croit perdu, mais pour la première fois de sa vie il est libre de sa vie. Il n’a plus de voiture, plus de raison de mal faire.
Il traîne quand même partout sa blessure et la violence qu’il a appris dans la pègre. Il fuit sans cesse.
Cette fuite le sépare de son ami l’arnaqueur pendant près de sept ans.
Durant ce temps il grandit. Il apprend à s’apprivoiser. Le feu de la colère l’emporte parfois, mais il réalise qu’il est un homme bon, qu’il tisse des liens facilement, qu’il sait commander l’attention des gens sans leur faire violence.
Puis, un jour, porté par son cœur il rentre à la maison.
L’arnaqueur est là et l’attend. Ils reprennent les vieilles conversations, mais tout détonne.
Le chauffeur, habitué qu’on lui attribue toute fausseté du ton s’en choque.
L’arnaqueur s’attache aux fétiches du passé. Des fétiches morts depuis longtemps. Le chauffeur a abandonné plusieurs couches de colère, mais pas toutes.
Il rêve d’être reconnu pour son parcours, son cheminement, il voudrait partager son expérience, mais l’arnaqueur n’est pas intéressé à l’écouter.
Le silence s’est emparé de l’âme de l’arnaqueur. Le chauffeur voit le champignon du malheur croître en lui et s’en inquiète.
Il ne sait pas comment lui faire réaliser.
Alors il commet une erreur.
Il se choque.
L’arnaqueur se braque derrière ses murs froids. Il pense avoir raison. Le chauffeur se désole de voir son ami se couper ainsi chaque fois qu’il est contrarié. Il a fauté et s’en excuse, mais réalise en même temps l’ampleur du défi. Un mécanisme de défense l’empêche l’arnaqueur de confronter ses faiblesses et le coupe de tout ceux qui l’aiment.
Pire, cette fermeture l’enferme.
Dans son placard le chauffeur a gardé une chemise que la femme de l’arnaqueur lui a donné il y a des années.
Cette chemise était déstinée à son mari, mais dans sa froideur et sa rigidité il l’a refusée.
Blessée, la femme de l’arnaqueur s’est enfoncée dans ses projets. Les demandes tranchantes et calculatrices du mari sont restées lettres mortes, le gouffre entre les époux s’est élargi.
Le chauffeur ne porte pas souvent cette chemise. Trop souvent sur son chemin il a accepté les cadeaux de certaines femmes qui étaient destinés à d’autres hommes. Il a honte de cet étrange pouvoir de séduction que l’ouverture lui confère.
Le chauffeur est une personne capable d’ouverture quand il cesse d’être en colère.
Il est capable d’accepter de jouer le jeu de l’autre, de se laisser entraîner, de participer à une inititive qui ne vient pas de lui au plaisir d’une autre personne, d’être généreux.
Bien sur ce pouvoir a une limite. Le chauffeur est un homme très sensible qui n’accorde pas sa confiance facilement. Il a soif de liberté, pour qu’il participe au jeu on doit lui donner de l’espace pour qu’il puisse exercer son libre arbitre.
Quand tout fonctionne bien, ce jeu de connection l’entraine dans des sentiers inexplorés.
Mais chaque fois qu’il s’en ouvre à son ami l’arnaqueur dans l’espoir de l’aider, celui-ci le jalouse et se braque.
Le don n’opère pas avec cet homme.
Alors le chauffeur s’enfonce dans sa vieille habitude, il tempête. Il se trouve devant son ami incapable d’exprimer sereinement ses besoins.
Puis un jour il tombe amoureux d’une sorcière.
Il réalise qu’il lui reste une couche de colère…..
La sorcière éveille aussi en lui un pouvoir latent de chaman.
Le chauffeur réalise qu’il doit tenter une dernière invocation pour sauver son ami.
Ce risque pourrait réparer leur relation, oui, mais surtout ce risque pourrait aider l’arnaqueur à faire face à ses faiblesses, à s’ouvrir et à progresser.
En acceptant qu’il est possible de changer il pourrait devenir un meilleur père.
En cessant de sacrifier son pouvoir d’action sur l’autel d’une perfection impossible il pourrait essayer de nouvelles choses et grandir
En s’ouvrant aux demandes de sa conjointe il gagnerait son cœur et retrouverais une tenderesse perdu.
Alors le chauffeur décide de plonger
Il faut enseigner à l’arnaqueur la voie de la vérité :
L’amour inconditionnel ne nous exempte pas de nos responsabilités
Ce que nous disons par maladresse ou par ignorance peut faire mal aux autres
Quand nous sommes rigides et que nous refusons le dialogue nous sommes responsable du fait que les relations se détériorent
Il faut essayer une dernière fois de faire comprendre à l’arnaqueur que l’amour ne le dispense pas de respecter les limites des autres, les lois des relations.
Le chauffeur a décidé.
Si son ami n’ouvre pas son cœur, il devra s’en séparer.
La relation est morte depuis longtemps. Tout est devenu toxique.
Il en pleure beaucoup, mais il sait que c’est le seul outil qui restera dans son coffre si l’arnaqueur refuse de respecter ses limites.
Le chauffeur espère que tout finira bien quoi qu’il arrive.
Pas pour lui.
Pour l’arnaqueur
Pour sa femme
Pour ses enfants
Ils méritent mieux.