Pour l’enfant triste qui pleure et qui ne réalise pas que le soleil
est juste là derrière la fenêtre.
G.
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Les biscuits
Il était une fois un garçon très triste. Il s’appelait Bourdieu. Bourdieu était grand maigre et gauche. Il aimait tout le monde, mais les gens ne l’aimaient pas. Chaque fois que Bourdieu était maladroit on le jugeait, on lui faisait des commentaires, on pensait qu’il était un peu idiot. Bourdieu en était très triste.
Puis un jour Bourdieu rencontra une fille qui s’appelait Arendt. Arendt était comme une boule d’amour qui voulait qu’on l’aime. Elle écrivait des cartes pleines de bons souhaits, aimait cuisiner pour ceux qu’elle aimait. Elle aimait aussi raconter des histoires et chanter des chansons.
Arendt était très ouverte d’esprit. Chaque fois que Bourdieu se sentait seul, il allait la voir et lui proposait des idées pour ses projets. Arendt faisait toujours un effort pour inclure ses idées dans ses chansons ou ses histoires.
Une fois Bourdieu lui avait demandé d’écrire sur un voyage spatial. Arendt lui avait écrit dix pages de texte ou deux amis voyageaient ensemble partout sur plein de planètes différentes.
Il y avait aussi le super-héros qui ressemblait à cupidon que Bourdieu avait créé en pensant à Arendt. Arendt avait tout de suite aimé l’idée et avait créé pour le personnage une arc à câlins.
Bourdieu était très content d’enfin avoir une amie qui lui permettait de créer en équipe. Il se sentait chanceux de connaître Arendt.
C’était un plaisir de partager son espace créatif.
Puis la vie les a séparé pendant un moment. Bourdieu est tombé amoureux, Arendt s’est fait plusieurs nouveaux amis. Ils ne se voyaient plus autant.
L’amour étant ce qu’il est, Bourdieu a éventuellement perdu son amoureuse. Il se sentait seul. Pour se consoler, il est allé chercher un petit chaton à la SPCA. Le vétérinaire de la SPCA était un cousin de Arendt qui avait plusieurs fois joué au facteur pour les deux amis.
Arendt aimait beaucoup donner des cartes, des biscuits ou des cadeaux à ceux qu’elle aimait. Bourdieu était heureux chaque fois qu’il recevait un de ses cadeaux.
Bourdieu demanda au vétérinaire des nouvelles de Arendt. Elle allait bien, elle allait bientôt commencer le secondaire, faire du théâtre, faire de la gymnastique. Arendt avait beaucoup de projets et beaucoup d’amies.
Arendt était une fille pleine d’énergie. Bourdieu l’appréciait beaucoup.
Il quitta la SPCA avec un sourire aux lèvres, son amie allait bien.
Il reprit le cours de sa vie, mais le chaton complètement revêche lui causa plein de problèmes.
Il n’écoutait pas les instructions de Bourdieu, mordait les meubles, griffait son sofa. Quand Bourdieu essayait de lui mettre des limites, le chat ronronnait et se frottait sur lui.
C’était un chat sauvage impossible à contrôler.
Bourdieu avait beau lui donner des ordres, le nourrir, le caresser, le chaton ne pouvait pas arrêter de le griffer et de mal agir. Plusieurs fois Bourdieu s’est mis en colère contre le châton. Il lui criait après. Chaque fois il se sentait coupable.
Il était certain que Arendt, elle, aurait su comment amadouer le chaton sauvage. Il avait honte. Il ne voulait pas qu’elle sache les mots méchants qu’il avait dit au châton, les gestes brusques aussi. Il avait une fois lancé une assiette par la fenêtre parce que le chaton ne voulait pas manger et le regardait avec un air arrogant.
C’était très triste. Bourdieu avait cru dans le chaton. Il avait pensé que l’animal pourrait être comme un frère, un ami, un confident. Le félin n’était pas comme il l’avait pensé.
Bourdieu voulait s’en séparer, mais il n’en était pas certain. C’était un choix difficile.
Il alla rencontrer le vétérinaire de la SPCA pour lui demander conseil. Arrivé à la SPCA, Bourdieu salua le vétérinaire qui lui remit sans préambule un cadeau de Arendt : Des biscuits aux brisures de chocolat.
Bourdieu tout ému oublia de demander conseil concernant le chaton.
Il rentra à la maison.
Son échec avec le chaton n’était plus aussi important.
Ce qui comptait c’était ce qu’il pouvait faire pour être heureux, pour donner, pour aimer et être aimé : comme Arendt.
Il devait apprendre une nouvelle façon d’aimer en donnant aux autres, une nouvelle façon d’être bien, une nouvelle motivation pour faire des choses.
Il ne savait pas comment faire.
Alors il s’inspira de son amie pour commencer.
Il lui fit des biscuits.
Et lui écrit une histoire pour Noël.
Il ne savait toujours pas quoi faire du chaton.
Mais il était convaincu qu’avec de la patience, du travail et de l’amour
Il deviendrait plus fort, plus empathique, plus libre d’essayer, plus humain : Il trouverait une solution.
Échouer fait partie de la vie.
C’est ce qui est dans nos coeurs qui compte Arendt.
Écrit à Magog au début d’un long chemin, le 20 décembre 2020